Comme le rapporte le journaliste Emmanuel Paquette pour L’Informé, le Service d’information du gouvernement (SIG) vient de lancer un nouvel appel d’offres pour renforcer sa surveillance des activités des Français sur le web. Cette initiative, qui va s’appuyer sur l’intelligence artificielle, a pour objectif de mieux capter comment les citoyens perçoivent l’action publique. Et ça fait froid dans le dos en termes de vie privée.
Le contrat, évalué à 1,26 million d’euros HT par an (soit 5,05 millions sur quatre ans), est désormais divisé en cinq lots au lieu de trois en 2021, d’après CB News. Cette période couvrira notamment d’éventuelles législatives anticipées et la présidentielle de 2027, dans un contexte où l’opinion publique est de plus en plus fragmentée et où les risques d’ingérences étrangères restent présents.
L’État mettra en place une surveillance de vos activités en ligne
Pour commencer, le premier lot porte sur « la mesure d’impact en temps réel des contenus publics accessibles en ligne » sur des plateformes comme X, Facebook, Instagram, YouTube, TikTok, et même les forums. Le deuxième lot se concentre sur la surveillance des discussions publiques concernant le Président, le Premier ministre et les institutions.
Deux nouvelles missions sont ajoutées cette fois-ci : la détection de signaux faibles (lot 3) et l’analyse des recherches en ligne des Français (lot 4). L’IA sera utilisée pour « analyser les sentiments », « prédire des événements » et détecter les « narratifs qui se propagent », incluant la désinformation et les appels aux rassemblements. Cette fonctionnalité répond aux mobilisations inattendues comme les gilets jaunes en 2018 ou les manifestations contre la réforme des retraites en 2023.
Le « search listening » analysera les recherches sur Google et potentiellement aussi sur TikTok, YouTube et Instagram, permettant de suivre les tendances de recherche selon les régions et le temps.
Le SIG, dirigé par Michaël Nathan, précise que seules les données publiques seront utilisées, sans passer par une saisine de la CNIL. Les prestataires seront sélectionnés le 28 mars et devront respecter le RGPD. En 2021, ce sont Visibrain, Talkwalker et NewsWhip qui avaient remporté cet appel d’offres.
Source : L’Informé
La question de la vie privée, bien qu’importante, semble en réalité détourner l’attention du problème fondamental que pose cette initiative : celle d’un gouvernement qui acquiert une compréhension sans précédent des ressorts de l’opinion publique, et qui risque de l’utiliser pour manipuler les perceptions et diriger les débats publics à son avantage. En surveillant les intérêts et préoccupations des citoyens, on ne s’intéresse plus à des données anonymes, mais bien à une lecture en temps réel des comportements de masse. Cela ouvre la voie à une influence constante et insidieuse sur les opinions, orientant les masses là où le pouvoir le souhaite. Le véritable danger n’est donc pas uniquement une atteinte à la vie privée, mais bien l’éventuel recours à une « ingénierie sociale » au service des politiques de l’État, réduisant chaque citoyen à une simple variable dans une équation manipulable à l’infini.